Le vignoble jurassien est un petit monde à part. Sur à peine 2000 hectares, il déploie une diversité rare, presque paradoxale. Peu de régions viticoles, en France ou ailleurs, concentrent autant de singularités sur un espace si restreint. Ici, chaque cépage raconte une histoire, chaque vin porte en lui un bout de géologie, un héritage paysan, une intuition transmise de génération en génération.
Le savagnin est le plus célèbre, bien sûr. C’est lui qui donne naissance au vin jaune, ce vin oxydatif élevé sous voile, que d’aucuns trouvent déroutant, et que les Jurassiens considèrent comme une fierté. Le savagnin est aussi à l’origine de vins ouillés, droits, tendus, d’une pureté fascinante.
Mais il ne faudrait pas oublier le poulsard, cépage délicat, fluide, qu’on croit léger mais qui porte souvent des notes de terre, d’humus, de cerise fraîche. Ni le trousseau, plus solaire, plus dense, qui adore les graviers chauds de Montigny-lès-Arsures. Et bien sûr, le chardonnay, qui ici se distingue de son cousin bourguignon par une austérité minérale, un sérieux presque bourru qui se dompte avec le temps.
La force du Jura, c’est d’avoir su préserver ces identités tout en les faisant dialoguer. Chaque vin est une partition, chaque vigneron un interprète, et le cépage n’est jamais seul à chanter. Il est accompagné par le sol, le climat, les gestes de l’homme ou de la femme qui l’élève.